De la nécessité d’améliorer la performance des sociétés du portefeuille de l’Etat

La mobilisation des ressources internes est une problématique majeure qui conditionne le fondement institutionnel de l’Etat et l’efficacité de ses rôles régaliens. Le sujet est encore plus récurrent en République de Guinée, avec la perspective du financement des politiques publiques durant cette période transitoire (Charte de la Transition Guinée,2021).

Les ressources non fiscales (RNF), en tant que composante des autres recettes budgétaires de l’Etat, constituent une des sources de financement des dépenses budgétaires (Article 18 de la LORF, 2012). Les données de la Banque Mondiale [1] révèlent un niveau faible des RNF en République de Guinée, avec en moyenne 1,01% du PIB entre 2010 et 2018. Pendant ce temps, d’autres pays d’Afrique subsaharienne affichent une performance relativement meilleure (5,9% au Togo; 5,1 % au Burkina Faso; 3,8% au Ghana; 3,7 % au Sénégal; 3,3% au Mali; ou encore 1,7% en Côte d’Ivoire) [2].

La contribution des sociétés publiques aux recettes budgétaires de l’Etat, en termes de dividendes, constitue un pan important de la stratégie de mobilisation du Ministère en charge de l’Economie, des Finances et du Plan (MEFP).

Cependant, les chiffres relatifs aux dividendes versés interrogent sur l’efficacité de la gouvernance des organismes publics en général et, des sociétés publiques, en particulier. En effet, selon les données de la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique (DGTCP), sur la période 2018-2021, le montant des dividendes versés par les sociétés publiques et celles avec participation de l’Etat, s’élève à environ 2 030 milliards GNF – dont seulement 6% payés par les sociétés publiques (capital de l’Etat supérieur ou égal 50%) et 94% versés par celles à participation minoritaire de l’Etat. Les sociétés minières sont les principales pourvoyeuses de dividendes avec 75% du total des versements de toutes les sociétés à participation minoritaire de l’Etat. Les enjeux socio-économiques, financiers, environnementaux et de transparence exigent une gouvernance de qualité de ces sociétés en vue de rassurer l’ensemble des parties prenantes des projets miniers que sont notamment l’Etat, les investisseurs, les travailleurs, les populations, etc.

Parallèlement à la perception des dividendes, l’Etat guinéen apporte un soutien presque systématique aux sociétés publiques dans le cadre de leur exploitation et/ou de la réalisation de leurs investissements. De 2018 à 2021, les sociétés publiques ont versé à l’Etat près de 124 milliards GNF, au titre des dividendes. Sur la même période, ces mêmes organismes publics ont bénéficié des allocations budgétaires, au titre des subventions, de 1439 milliards GNF selon les données tirées de la chaine de dépenses. L’octroi de ces subventions est caractérisé par une grande disparité car elles sont absorbées pour l’essentiel par les sociétés du secteur de l’énergie, qui font malheureusement peser d’énormes tensions/risques sur le budget national.

Il ressort de l’analyse de l’apport (dividendes) et du coût budgétaire (subventions) des sociétés publiques que ces organismes publics coûtent beaucoup plus qu’elles ne contribuent au budget de l’Etat. Sur la période 2018-2021, les dividendes versés par ces sociétés représentent 8,5% des allocations budgétaires, au titre des subventions, en leur faveur contre 132% pour les sociétés à participation minoritaire dont la performance est clairement imputable à la qualité de leur gouvernance (conseil d’administration opérationnel, commissariat aux comptes, organes de direction et de contrôle, etc.) mais aussi à la pression incessante des actionnaires privés majoritaires qui exigent la rentabilisation de leurs investissements.

[1] « Banque Mondiale 2019. Guinée-amélioration de la mobilisation des recettes intérieures : taxe sur la valeur ajoutée et droits d’accises. ©Banque Mondiale »  

[2) Revenue Statistics in Africa | Statistiques des recettes publiques en Afrique – © OECD/OCDE 2020